mardi 31 mai 2011

Border la béanse

Border le trou laissé par l’explosion-implosion du voile du familier. Border le vide-à-vide laissé par une réalité qui s’écroule dans la houle, ne laissant prise qu’au Réel, toxique fiel. Border cette vacance laissée par le lien rance de Transvivance. Border cette béance qui happe et foudroie dans le corps aux abois. Border c’est tendre la grande voile pour qu’elle retrouve l’inaccessible étoile. Border pour que la voile tisse sa toile au-dessus du néant ; rebondir alors sur cette toile, par touches de couleurs, d’un coup de pinceau délivrer l’héritier, d’un geste lancinant tenir avenant sur les pentes lentes du lien à autrui qui s’enfuit. Parce que c’est bien ce lien à autrui, dans son altérité déterminée, dans sa proximité du familier, qui s’est effondré dans un cataclysme détruisant l’isthme reliant à la Terre ferme. L’Autre de la parole s’est vu vidé du sentiment de familier, la langue colonisée par le Réel, toxique fiel, par le Transvivant qui tire dans les rangs. Bout de rien, les mots deviennent des coquilles vide et à-vides.  Pour cacher la béance, le moi s’est vêtu d’un faux-self, elfe dans un monde humain étrange ; il plaquait des scripts pour que s’applique une illusion de familier. Mais les mots vides arrachaient des morceaux de chaire, hégémonie sur le corps devenant peu à peu un dé-corps qui ère. Des mots se font maux et tournent dans la tête, s’imposent à la conscience dans une pseudoscience ; ils deviennent signes de la béance d’où ils surgissent des infinis tréfonds sans fond.
Que reste-t-il quand la langue corporéïsée devient vide et étrange ; quand les mots hantent la tête comme des fantômes, quand ils triturent le corps comme des sangsues sanguinaires ?
Il reste les courbures lettrées… En arabesques elles tissent un filet de sécurité au-dessus du vide. Elles le bordent. Fresques insensées, elles tissent toujours et encore, aiguilles à tricoter sans repos au bord de l’eau, la mer voit une barque de paille surnager. Elle surnage en-âge, elle recrée de l’espace-temps sur lequel on puisse s’accrocher, funambule entre ciel et bulle. Mais c’est de sa qualité de paille sur l’eau qu’il faut lui fournir sans cesse de l’énergie. C’est pourquoi il y a besoin de l’aide des médicaments et des thérapeutes, pour pouvoir fournir cette énergie, pour que les courbures lettrées retissent une enveloppe dans un flop. Les courbures lettrée constituent une nouvelle langue dans laquelle il devient possible d’approcher l’indicible. Elles enveloppent le corps dans un décors plus familier, elles écartent le sentiment d’étrangeté. Elles permettent de penser et de panser les béances rances.  Elles permettent de construire un pare-excitation aux intrusions de « mots-vides » qui hantent et s’imposent dans la tête sans sens, sans anse de sens.
Une nouvelle langue pour border les trous à-vides d’humanité, pour retisser du lien à l’Autre, en tentant de lui envoyer un témoignage de ce qu’on vit sur un différent rivage. La psychose ose détruire le voile du familier dans une transvivance insensée ; les courbures lettrées mettent un peu de distance avec cette étrangeté.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire