lundi 25 avril 2011

Vivre avec la maladie

Atrophie du sentiment de vie, misanthrope qui est balloté dans un flop. Asservissement à l’Absolu dont le relatif est mis à nu. Mise à mort du dé-corps, tout devient cru depuis que le voile du familier a été déchiqueté. A 16 ans tout a basculé, quelque chose s’est effondré et depuis la réalité est changée. D’un coup le Réel s’est imposé du haut de sa tourelle. Ecorchée vive, de stimuli, ivre. Le livre de la Vérité s’est ouvert d’un coup et a fait devenir fou ; sans code on n’en comprend pas l’ode.
Maintenant, il s’agit d’apprendre à vivre avec la maladie, avec cette perception du monde dont les dimensions emportent de l’être les sillons. S’accrocher aux rendez-vous quotidiens qui font que la parole n’est pas rien. Ils donnent consistance à une anse de sens. Sublimer la sensibilité pour qu’elle soit un atout de bout en bout. Apprendre à ne plus avoir peur de l’autre, apprivoiser la terreur. Accepter que la maladie confère des richesses dont, pour l’instant, on ne voit pas les tenants ni les aboutissants. Croire, sans déboire, dans la douceur du soir. C’est un acte de foi que de croire qu’une fois l’avenir pourra exister dans le rire. Acte de foi rempli de doutes, terrorisée par la banqueroute.

Trop en-faire

S’enferrer dans le faire devient vite un enfer. Et pourtant ne rien faire est un coup de fer assené par chaque seconde inféconde. Ça tire, ça broie dans le brouhaha ambiant qui mène à trépas. Ne rien faire autant que faire reste un enfer. Ce paradoxe, d’abord inextricable, se voit capable de compréhensible dans la cible : pour faire ou ne rien faire, il s’agit de trouver consistance par ici. Une consistance, une sécurité intérieure qui prémunisse contre l’extérieur. Sinon on se dilue dans les crues des stimuli aboutis. A bout de ‘tites forces le corps devient une vieille écorce ; il s’effrite, se délite, ré-alité au Réel, toxique fiel.
Mais comment trouver une consistance concrètement ? Dans la quotidien quels sont les petits pleins auxquels se raccrocher ? Il y a les courbures lettrées qui dansent le menuet, le menu est aux manuscrits en catimini. Il y a la famille qui se joue des quilles. Il y a l’équipe soignante qui fait une enveloppe aimante. Il y a le projet d’AAH et d’hôpital de jour qui donne un statut, par la société, reconnu. Mais pourtant on reste fragile comme, au milieu du vide, une île.
Comment trouver une unité d’anse de sens, une consistance qui envie que la vie avance ?

Sécuriser serait mettre en danger

Sécuriser serait mettre en danger. Se mettre en danger est-ce se jeter dans la gueule du loup ? Louer le danger en faisant violence à l’enfant autiste, art-triste d’une autre monde ? Il y a deux possibilités pour le faire grandir : à coups de triques ou à coups de tendresse en liesses. Faut-il lui faire encore et toujours violence ou lui apprendre le lâcher-prise au creux de la bise ? Concrètement, se mettre en danger, est-ce se forcer à prendre une position adulte, anacoluthes qui percutent, trouver un travail pour le touaille, et vivre seule dans un linceul ?
Se mettre en danger renvoie au gouffre infini dans la nuit vers lequel on avancerait inéluctablement. Apprendre à faire du vélo appelle des risques, la sécurité viendrait de la vitesse pour tenir équilibré. Mais avec les angoisses de la psychose, faut-il se mettre en danger en grillant les étapes pour prendre de la vitesse ? En fait, on n’en peut plus du danger, il est partout, dans tous les trous le vide-à-vide asprasse dans un tour de passe-passe. Faut-il aller vers toujours plus de danger pour se sentir enfin en sécurité ? Si c’est le cas, autant courir à trépas.

Se sentir en sécurité

Se sentir en sécurité pose bien des difficultés. La bulle de l’enfant autiste funambule est nécessaire tel un rideau de fer. Paradoxale balle, elle percute entre sécurité et cécité. Ça protège mais ça enlève le lien à autrui qui donne clarté à la nuit. L’enfant autiste est pris entre séparation et dévoration. Parler à l’autre c’est se faire dévorer en entier ; pourtant le sens de la vie semble dans le lien à autrui. Il s’agit de trouver un terrain de jeu où le « je » prenne consistance dans des anses de sens.
Se sentir en sécurité, c’est peut-être reconnaître l’anormalité comme une richesse. Mais c’est difficile quand on se sent éparpillée comme des îles flottant dans le vide-à-vide. Solitude rude de ne pouvoir se confier aux autres comme un hôte.
Cécité de la réalité. Nécessité d’en comprendre le code pour y évoluer. Comment se sentir en sécurité sur des sentiers non balisés ? Chantier à ciel ouvert sur l’Infini de l’Univers. L’Absolu du Réel, toxique fiel, donne le vertige, funambule prêt à tomber de la tige. La mort rode dans tous les coins, sensation catastrophe de la séparation. Comment, dans ce contexte, sécuriser l’enfant autiste pour qu’il puisse trouver un espace pour y évoluer, pour exister ?

Peur de reperdre une partie de soi

Peur de reperdre une partie de soi comme il en fut autrefois. S’attacher, pieds et poings liés, à autrui dans la nuit c’est prendre le risque de se perdre à jamais. La passion n’a pas de raison, et fait se perdre de l’être les sillons. Besoin d’un double pour exister, pour tenir debout, physiquement dans les bourrasques de vent. Devant soi un corps qui donne consistance à l’être de soi. Mais quand le double s’arrache, quelque chose s’effondre dans un coup de hache. Acheminé par la réalité, explosé par le Réel, toxique fiel. Alors l’enfant autiste, funambule, reste dans sa bulle. Sans double, il perd une partie de soi, celle qui donne une existence, une anse de sens.
Comment lier contact avec autrui sans se perdre dans la nuit ? Il s’agirait de trouver la bonne distance, celle qui ne rend pas le lien rance. Mais pour se faire, il faudrait combler le vide, au moins lui donner bordures et ramures, pour se sentir exister seule, sans double et sans linceul.
Mais derrière ses avants peu avenants, l’enfant autiste, art-triste, est assoiffé de tendresse en liesses. Il ne sait comment faire sans ce double, tout devient trouble. La réalité est étrange dans ses langes. Langage indécodable sans la présence du double capable.

Normalité

La normalité est là pour suivre des sentiers sans se faire trop d’idées. La quitter c’est entamer un long voyage dans les bris des âges. Il s’agit de se frayer un chemin, sans balises, au gré de la bise. Et il faut lutter pour ne pas être rejetée par autrui dans le silence de la nuit ; ce dont on témoigne remet trop en question, de la normalité, les sillons. L’Absolu du Réel, toxique fiel, fait fuir autrui dans les sentiers endormis. La plupart des gens ne peuvent entendre l’art de remettre en question le voile du  familier, pour nous déchiqueté. Solitude d’être rayée des sentiers de la normalité ; a-t-on le droit quand même d’exister ?
L’enfant autiste, art triste, hurle d’angoisse dans sa bulle. Il ne voit que trop l’Infini tapis derrière chaque énergie. A part avec les professionnels qui volent, anges à tire d’ailes, il n peut communiquer ce qui le traverse, le broie, en entier. Solitude de l’anormalité, rude absence de balisage, comment trouvé consistance dans un vide-à-vide d’anse de sens ? L’enfant autiste se balance pour retrouver une relative sérénité. Mais sans balisage, l’espace-temps est moins sage, ode dont on n’a pas le code.

Mouvement

Retrouver une consistance, une anse de sens. Elle serait toujours là, mais insensible comme trépas. Au trait du pas, elle devrait se révéler ; un stimulus devrait la réveiller aux coutumes et aux us. Mais que d’angoisses face à ces stimuli qui, aux sorties du lit, happent et d’un coup frappent. Et pourtant il faut arrêter de « tenir » et apprendre à lâcher-prise dans la bise. On ressent le besoin d’un double qui donne une existence face à l’Infini de la Vie.
Il faut du mouvement pour sortir du turbulent. Mais l’angoisse empêche que les choses se meuvent tant qu’elles peuvent. Preuve à l’appui, la vie est en sursis. Construire un espace entre la naissance et  la mort pour que l’enfant autiste, art-triste, puisse grandir et s’épanouir hors de la bulle, funambule. Mais concrètement on ne sait comment le faire goûter aux plaisirs de la vie. Chaque élément de l’extérieur provoque la terreur. Sensation de sans-issue qui donne envie que tout s’arrête, de fermer pour toujours les mirettes. Pourquoi la vie est-elle un combat qui mène à trépas ? Terreur de la séparation qui détruit de l’être les sillons.
Dans le mouvement trouver une consistance est un combat que l’on mène avec peine.

Mode d'emploi

Trouver une consistance, une anse de sens, mettre une bordure au vide-à-vide, même si ce n’est que des rides. Rideau à poser sur le sceau du langage pour trouver une place à l’Autre. Trouver un moyen de reconstituer le voile du familier pour que cesse l’asprasse dans le sas. En un tour de passe-passe, quelque chose s’est effondré et s’est perdue la réalité. Le mode d’emploi choit dans un vide sans fond, et le puzzle reste insoluble, seule. Tout est morcelé, sans once d’unité. Et pourtant quelque chose tient à chaque lendemain ; on peut penser que c’est la capacité d’analyse qui permet que les choses ne s’enlisent. A bout de bras, elle remplace le mode d’emploi. A la force du poignet les courbures lettrées permettent de rendre possible le compréhensible ; elles évitent un enfermement qui, dans le vent, rendrait fou complètement. Mais il faudrait trouver d’autres points d’accroche pour unifier le mode d’emploi dans une strophe ; ou plutôt pour créer un nœud nouveau qui garde la tête hors de l’eau. Un nœud entre les morceaux qui remplace, un tant soit peu, le mode d’emploi disparu dans les crues. Quelque chose s’est effondré à 16 ans, et au devant ne laisse que le vide-à-vide. Le mode d’emploi a disparu dans ce tréfonds sans fond. Il s’agit de pallier à cet effondrement. Les courbures lettrées, et d’analyse la capacité, permettent que tienne, à bout de force, d’échappé aux morcelés. Mais ça ne suffit pas à échapper aux trépas ; ça permet juste de tenir à la force du poignet. Il faudrait d’autres points d’accroche pour unifier, stabiliser la strophe. Comment en trouver dans le concret ?

La partie indésirable

La partie indésirable est incapable de tenir une conversation, elle en perd de l’être les sillons. Vers-moulu, elle n’arrive pas à se saisir de la vie. Enfant-vers, autiste d’art-triste, ça ploie, ça broie. Il faudrait s’en débarrasser dans le premier vide-grenier.
Comme Gregor de Kafka, les gens ne le comprennent pas. Ils voudraient la voir disparaître, qu’elle ne puisse plus être. Mais « être » c’est justement ce qui lui pose problème blême. A-même est son maître-mot, lourd fardeau. Tel un caméléon, l’enfant autiste se modèle à l’interlocuteur, seul moyen, pour lui, de ne pas faire d’erreur. C’est un fantôme dont la transparence ne prend consistance qu’en écho de l’Autre. Pourtant cet écho est mauvais parce qu’aux gens il déplaît. Il n’a pas le droit d’exister dans la société.
On l’aime, on le déteste ; voilà le maître-mot qu’il reste. On le redécouvre à chaque nouvelle confrontation à l’autre. A chaque fois c’est descente en en-faire. Ça tourbillonne, ça se dilue dans les crues, flots tournoyants et menaçants. Le miroir de l’autre renvoie une image faussée, en patte d’oie. Ça asprasse dans un tour de passe-passe. Dans ce contexte complexe comment aimer l’enfant autiste pour qu’il puisse grandir, s’épanouir ? Comment unifier les parties clivées pour trouver une unité ?

communiquer

Communiquer, être en communion de la conversation, emporte de l’être les sillons. Être à l’écoute ne met pas en déroute, c’est même seulement ce que l’on sait faire sans s’enferrer dans le bourbier. Ecouter, conseiller, analyser pour ne pas être emportée loin des chemins balisés. S’accrocher aux phrases de l’autre pour y comprendre la réalité. Acquiescer aux volutes parolières de l’autre pour ne pas que soit détruite notre hutte.
Pourtant les anacoluthes percutent. La normalité de l’autre n’est pas notre réalité. On est à l’écoute, mais dès qu’on doit parler de soi, on coule avec le boute du navire. Ça chavire, ça s’écroule on est confrontée au vide-à-vide ; ça asprasse dans un tour de passe-passe. Seules les courbures lettrées expriment un peu ce que l’on ressent dans les rangs. Hapax sans relaxe, l’enfant autiste, art-triste, se trouve décalé par rapport à la réalité. Il voudrait exprimer l’Infini indicible du Réel, toxique fiel, mais il ne trouve pas les mots à poser sur les maux.
Et l’autre, la plupart du temps, refuse de se mettre sur la même longueur d’onde, désespérante fronde. Il se cache derrière la normalité et ne peut comprendre ce qui est exprimé.
Il s’agit de trouver une transition pour qu’avec autrui puisse se construire un pont. Un espace en-dehors-en-dedans, terrain de jeux où puisse naître le « je » exprimant ce qu’il ressent vraiment.
L’autre doit se mettre sur la même longueur d’onde ; l’enfant autiste doit apprendre à jouer avec les mots, avec autrui, à jouer tout court dans la courre. Comment lui donner la clé pour jouer dans cette immensité ? 

ça s'effondre

L’eau coule dans le houle, on se dilue dans les nuées ardentes du tournoiement de l’ampoule. Le filament grésille, ça fourmille dans tout le corps. La pulsoyance n’est plus, se perd l’anse de sens. On tournoie, on louvoie mais voit comme le gouffre est infini et s’annonce en catimini. Pas d’autre issue possible que de s’acheminer, chancelante, vers ce vide-à-vide qui hante. Est-ce cela la vie, aller de dangers en risques, sans jamais s’y trouver, fantastique anse de sens ?
Le trait fulmine sans attrait d’où il pourrait s’inscrire sur la mine. Tout fuit, plus rien ne s’inscrit sur la page blanche de la vie. Comment rallumer cette lumière qui flamboyait au-dehors sans terreur de l’extérieur ? A 16 ans quelque chose s’est effondré et le rire s’est mis à mourir. Quelques courbures lettrées réussissent à exprimer ce qui aux tréfonds perd de l’être les sillons. L’écriture en ramure vient du dehors, la plus se laisse dès lors guider sur les sentiers perturbés.