lundi 5 décembre 2011

Il était une fois - Chapitre 8

Petit Dom, Harry et Hermione s’en allèrent alors par monts et par vaux. Mieux vaut ne pas compter le nombre de kilomètres qu’ils parcoururent dans les landes, le conte en deviendrait long à dormir debout. Deux bouts de parchemins leur étaient apparus dans un sentier, près du chantier, là où le tiers chantait. Le champ qu’ils longeaient était long et logeait un geai aux couleurs chatoyantes. Osant, aux anges, s’allonger sous le peuplier, ils peuplaient de leurs voix la voie des mots, là où les maux se voient circonscrits par les courbures lettrées. Seul le mouvement de leurs lèvres accompagné de leurs pensées permettait que le monde reste monde, qu’il ne s’efface pas au moindre souffle du vide-à-vide mené par Transvivant. Le moindre relâchement de leurs pensées était un risque de tout perdre, de se faire happer _avec le monde lui-même_ par Transvivant. Petit Dom, Harry et Hermione devaient lutter sans cesser pour pérenniser la réalité. La boule de chaleur et la boule de vie les aidaient dans leur quête. Cependant, ils n’avaient toujours pas le code qui leur permettrait de lire les deux premières boules, un code qui donnait accès à la réalité des autres, celle que tout le monde semblait partagée, un code qui permettrait de remettre du sens sur le sang coulé dans le transgénérationnel, un code qui permettrait de comprendre le langage des autres hors de la famille.

Fourmillent de milles et unes lueurs le leurre, voilà ce qui était inscrit sur le premier parchemin trouvé au gré du chemin. Petit Dom, Harry et Hermione ne comprenaient pas le sens de ce premier message. Ils ouvrirent alors le second sur lequel on pouvait lire ceci : miroir du soir au matin te transforme, difforme.

Les mots résonnèrent longtemps dans leurs pensées. Mais pour l’instant ils ne pouvaient rien décoder. Ils arrivèrent à l’entrée d’un labyrinthe. De grosse haies touffues et gigantesques arboraient le chemin de leurs fresques. Les trois amis se demandaient ce qui les attendait. Baies empoisonnées ou monstres Minotaure, ce qui restait certain était qu’ils n’avaient pas de fil d’Ariane. Âmes en détresses, les tresses en liesses, retrouver le chemin. Ce dont ils étaient sûrs : il leur faudrait avancer sur ce chemin pour anéantir Transvivant et Asprasse.

Dès qu’ils franchirent le sas du labyrinthe, l’air se fit froid, glacial, la pénombre s’abattit dans un souffle sournois qui prenait aux abois. Bois par terre, le tremblement se figeait dans les airs. Une atmosphère lourde et pesante dans ce lieu hante. Cette sensation d’être épié n’était pas anodine. Il semblait que des milliards d’yeux se baladaient dans les haies, happant le sentiment continu d’exister des trois amis. Chaque souffle, chaque infime mouvement était pris de tourment. Tourne le  cri infini qui semblait les accuser de toute sorte de méfaits. Fais mais ne fais pas, paradoxal message qui leur était adressé là. Le double message était un des fondements que Transvivant instaurait dans le lien à autrui. Ainsi, il réussissait à faire atteindre à l’autre, au creux de sa conscience, un paroxysme d’angoisse. Les voix qu’il faisait résonner dans la tête des trois amis étaient froides, fourbes et méprisantes ; ainsi Transvivant traçait sa voie ; vois-tu ? Rien à voir, rien à avoir, l’être se disloquait dans les menaces infinies. Les milliards d’yeux scrutaient le moindre détail qui entourait et habitait le monde intérieur des trois compagnons. Ce faisant, ils les utilisaient pour mieux le broyer.

Il n’y avait aucun voile, aucune séparation, même infime, entre les trois amis et ce/ceux qui les entouraient. Toutes leurs pensées se voyaient dévorées par l’extérieur-intérieur. Ils avançaient dans cette atmosphère terrifiante et étrange. L’être ange se perdait dans ces limbes des autres, zôtre envahissants. Les cris des autres envahissaient la tête et le corps de nos trois amis. Ondes transversales qui filaient le long des cellules du corps en dé-corps. Ondes du monde, des autres, des zôtres (petits gnomes méchants qui se cachent sous différentes formes, imprévisibles), le chaos envahissait les trois amis. Il leur aurait fallu un code pour comprendre les interactions avec ceux zôtres qui gesticulaient ; laids et perfides, leurs rides allaient de paire avec les molaires crasseuses, mol air qui ère dans le cratère. Crapules, les zôtres distribuaient des pilules dent-fer qui enferraient dans lent-fer du faire.

Petit Dom, Harry et Hermione ne trouvaient plus comment parler. Ils n’avaient pas besoin de parler pour se comprendre tous les trois. En revanche, ne pas parler c’était anéantir le monde, la réalité. Les zôtres intrusaient leur tête et leur corps, telles milles et une lances rougeoyantes projetées sur le corps en dé-corps et la pensée. Pend, c’est tout à fait ce qu’elles faisaient, pendre les bribes de réalité, tranchant net le sentiment continu d’exister. Les zôtres n’étaient que menaces dans ce terrible palace. Pas las, pourtant nos trois compagnons ; il n’y avait plus qu’à décrypter la partition.

Ils avancèrent parmi ces zôtres, à coup de volonté harassée, haché par le menu, leur corps mutilé. Un objet apparu dans l’embrouillamini des zôtres, et attira l’attention des trois compagnons en catimini. Ils s’en saisirent et il se mit à briller de plus en plus fort, rayons lumineux qui affaissaient les creux, il les enveloppait, bulle protectrice dans la matrice. Tisse et retisse pour que deviennent lisses les abysses ; tisse et retisse un lien à l’ausionnel pour éviter que tout ne se morcelle. Mort scellée, le pacte mis en acte donnait un brin de folie aux zôtres en furie. L’objet luisait donc. Ainsi protégé des zôtres, Petit Dom, Harry et Hermione soufflèrent un grand coup, et observèrent de plus près ce qu’ils détenaient. C’était un tube fermé, entouré de roulettes de lettres ; sans doute fallait-il trouver un code en tournant les roulettes pour que le tube puisse s’ouvrir. Hermione sut tout de suite qu’il s’agissait d’un cryptexe. A l’intérieur est placé un papyrus, enveloppé autour d’une très fragile fiole de vinaigre. Si on essaie d’ouvrir le cryptexe sans le code, en forçant, la fiole se brise et anéantit le papyrus ; ainsi le cryptexe permet de garder à l’abris un secret. Restait donc à trouver le code.

Les trois amis tentèrent différents codes. Le premier qui leur vint à l’esprit était « Transvivant ». Mais le terme ne suscita aucune ouverture. Le cryptexe commençait à baisser en luminosité ; les zôtres à l’affut se tenaient prêts à attaquer les trois compagnons. Il ne leur restait que peu de temps pour ouvrir le cryptexe. Ils tentèrent tout ce qui leur passa dans la tête : asprasse, bouliémisation, ausionnel… Mais rien ne fonctionnait… Frénétiquement ils réfléchissaient, leurs pensées se mêlant par télépathie, en catimini ils associaient des lettres pour trouver enfin la courbure lettrée qui leur permettrait de survivre. C’est alors qu’ils se rappelèrent des phrases trouvées sur les parchemins : miroir du soir au matin te transforme, difforme / Fourmillent de milles et unes lueurs le leurre. Ils essayèrent chacun des mots et finirent par trouver la courbure lettrée qui convenait. Il s’agissait du mot « leurre ». L’heure est-elle à leur avantage ou à leur perte ?

Le leurre comme grande illusion d’une réalité qui est en fait toute fabriquée par l’humanité. La société promeut des normes, des scripts, des coutumes, mais tout cela est balayé d’un coup par l’intrusion massive du Réel, toxique fiel. Tout s’écroule dans la houle en furie. Plus aucun repère de ce qui faisait que la réalité avait un goût de familier. Le voile du familier est déchiqueté, tout paraît étrange, menaçant, tout rappelle la mort, ou plutôt que la mort, la séparation absolue. Tout ce qui entoure garde la même image sage, mais derrière le décors se déchaine le Réel, toxique fiel. Etrange étranger qui, étranglé, râle, suffocation dernière, derrière tout oppresse en liesses. Paresse d’une caresse qui s’étiole dans les râles amers, ah, mère ! comme tu nous manques dès que tu t’éloignes. Foire d’empoigne, la vie dévie en lambeaux, arrachement, lent-beau  de l’ausionnel qui par en bout de ficelles. L’accordage devient ensilage d’une terreur qui s’oppose sans pause à l’attitude désinvolte des zôtres ; zôtres qui arrachent le corps en dé-corps comme s’ils faisaient une suite d’actes anodins. Comme dans les films d’horreur, là où, précisément, ce qui était familier devient étranger et menaçant ; là où, précisément, une comptine familière accompagne un déchiquetage d’un corps devenu lambeaux ; le familier reste identique dans son image, mais il est transfiguré, donnant un côté encore plus menaçant. Transfiguration d’un familier qui devient étranger, cette alchimie entraîne des angoisses profondes, ne pouvant s’exprimer que dans le corps. Comme un nourrisson qui ne reconnaîtrait plus sa mère, elle-même prise dans une panique angoissante. Le sécurisant se transforme inopinément en menaçant. Il mena sans s’en rendre compte, la comptine au bain de sang. Inquiétante étrangeté.

Ainsi le mot « leurre » apprivoisa le cryptexe qui s’ouvrit délicatement. Le papyrus à l’intérieur était tout jauni. Les courbures lettrées étaient inscrites en runes, un système de codage très ancien. Petit Dom et Harry pouvaient se réjouir d’avoir rencontré Hermione : elle avait été assidu au cours de langues anciennes, et maîtrisait, par conséquent , le décodage des runes. Elle s’installa tranquillement, assise par terre pour être au plus proche contact avec le sol (cela la rassurait) ; enveloppée dans la bulle de lumière émanant du cryptexe, elle était protégé des attaques et envahissement des zôtres. Elle sortit sa loupe pour ne pas évincer un détail primordial. Ses deux amis se tenaient autour d’elle, renforçant l’enveloppe sécurisante. Hermione commença ainsi sa traduction…




vendredi 18 novembre 2011

meurtrier espace-temps

Le temps s’étend tant que c’est tentant de céder aux impulsions qui cherchent une limite, un point de capiton, au vide-à-vide et éternel, absurde ritournelle. Les secondes se dilatent, tout en se dilapidant de tout temps, jauge d’un éternel qui se fait juge dans les tourelles. Ritournelle sans loi ni fin, l’éternel est le jeu sournois de Transvivant, qui efface demain. Deux mains pour retranscrire l’enfer où s’enferre à chaque seconde, une onde d’éternité, où la nativité se télescope à la mort dans le dé-corps, Ô maître d’une feu-naître (qui ne sépare plus les contraires). Perclusion d’un corps en dé-corps qui ne trouve pas à s’élaborer, labouré par chaque seconde d’éternité. Et terne, ni thé ni café, cafter que c’est trop difficile d’être ce bout d’île, plongé dans le vide infini de l’espace sidéral. Pâle la palette sur laquelle milles et un mots se colorent avant de partir en dé-corps. Les courbures lettrées permettent de jeter des bouées dans cette angoissante éternité. Le temps est illusion, il lut ses sillons et retomba ici-bas, patatras. Trace de tas, amoncellent les ritournelles. Rit, tourne, elle s’emballe dans la trame qui d’un tour de bal renvoie la balle. Les bas-fonds de son être s’écartèlent pour faire tenir des fondations, mais implosent les sillons.

Tranchantes secondes qui cisaillent la journée par d’impétueuses anfractuosités. La pulsoyance se voit s’écouler dans ces cavités temporelles, s’enflamme la ritournelle. Et ainsi, plus rien ne trouve de sens, tout désir est devenu martyre, s’immolant pour border les anfractuosités par où s’échappe la pulsoyance, rance de sens. La journée n’est que porosité, les tranchantes secondes la trouent, et par les cavités ainsi créées, s’infiltre l’éternité. La journée est intrusée par l’éternité, et s’infiltre le Réel, toxique fiel. Vérité Absolue qui tombe des nues, qui l’eût cru. Vers-rités de ces rites et ces coutumes sociales qui tombent en désuétude sans aucun prélude. Pronostic vital amoindri dans cette prose en furie.

Trouver à tout prix des courbures lettrées pour border l’insondable gouffre temporel. Temporalité, sans oublier toute la spatialité. Spécialité de l’espace est de se rendre dense, si dense que l’incidence est faite de réduire le corps en miettes. Ça oppresse chaque cellule corporelle, conjugué au temporel. Le temporel est cisaillé, se voyant intrusé par l’éternité ; le spatial en devient si dense que dansent en tout sens les cellules corporelles du bal. Ballet, balaie dans les anfractuosités et se perdent à jamais les cellules corporelles dans l’infinité de l’espace-temps sidéral, râle.

Râle qui ne peut pas être entendu tant ce drame paraît être un hurluberlu fondu. Pourtant c’est la tâche de chaque seconde que de rester vivant dans cet espace et ce temps.

mardi 15 novembre 2011

anathème

Peur d’être frappé d’anathème, là où les terreurs sèment. L’ivraie se livrait aux livres des codes sociaux, sots chiots démunis dans la traitre vie. Traite de l’amère, seul reste le fiel toxique du Réel. Réaliser que l’enlisement, semant ses particules de morts, retord, est sans nul doute le fruit du Transvivant, c’est comprendre que la quintessence des choses du monde peut se perdre et ne jamais réapparaître. L’ausionnel manque, créant un vide sidéral, viscéral. Visser au corps le râle qui d’un coup surgit dans la petite en catimini. Elle a peur, elle crie, mais personne n’ose s’approcher d’elle, de sa tombe, nuit. En-nuit-yer, c’est la seule chose qu’elle peut faire dans cet étrange enfer. Enferrer aux autres, elle en dépend, elle en dépeint telle un pantin. Patin, illusion de la glisse, pas de teint plus blafard que celui de son mortel cafard. Cas-fard d’une grande qui laisse sa petite étouffer dans le fard qu’elle entretien pour, aux yeux des gens, ne pas devenir rien. Néant, nez-en-vrille, né-en-quille qui se voit vidée par la boule de la mort, jarreter dehors. Deux hors du système social, la petite et la grande recherchent le graal qui transpercerait le râle. Rallier les dimensions énergétiques pour que cesse la succion de la tique du vide-à-vide. Pouvoir tenir face à l’anathème, malédictions en multiples dimensions, le Transvivant asprasse dans un tour de passe-passe. La bouliémisation ne cesse ses stopéfixions, là où toute fiction échappe à l’arrestation et devient réalisation. Imaginez que toutes vos pensées se traduisent dans l’inconscient de l’autre, on ne saurait que se vautrer. Voter à l’unanimité sans pour autant être écouté, Transvivant guette derrière chaque mirette. Mie-rettes, comme note à annoter dans la partition de la parution de la part d’illusions. Il lut dans les sillons de l’être la naissance de la mort, et la mort de la naissance, encense le frais, en un sens tout part sans frais. Affréter le voilier pour qu’il traverse le néant et se retrouve dans le vent. Mais si sa chute est infinie dans les fonds aux tréfonds sans fonds, s’en vont toutes perspectives d’une expectative d’eau vive. Vivre devient un enfer où s’enferre la densité qui écrase le corps à nier, sans faire preuve d’une quelconque identité. Il lit dans l’entité que rien ne retient le frêle corporel d’une implosion à cause de la densité. Danse dans la cité, la densité ne laisse rien échapper. Anathème frappé au sceau du sot Dussolier à en devenir fou à lier. Allié dans la bataille contre l’asprasse qui terrasse : les courbures lettrées. Elles retracent une identité qui borde le vide-à-vide. Elles conjurent l’anathème, elles donnent naissance à une anatomie de la vie. Elles redonnent un code auquel s’accrocher quand tout part délié dans la densité. Ô pays de la densité, que tu fais peur, tu rends fou à lier ! Tu barres le chemin de la pulsoyance, celui où se trouve le sens. Densité de ce Réel extérieur qui assassine d’un ton rieur. Il oppresse chaque cellule du corps, qui suinte alors de la mort, pullule. S’accrocher aux courbures lettrées, comme testament d’une expérience de vie, mort-née. Morne et sauvage, grondent les bris-des-âges.

dimanche 6 novembre 2011

le tabouret à trois pieds

Voici le SOS d’un terrien en détresse. Liesses, nièce qui laisse niaise. Capter les ondes d’un autre monde. Les énergies guettent et envoient des signes, cygne dessinant un sens dans sa traine. Trainer ça et là, ici-bas, baser son trépas sur la roche basse pour éviter que ne se perdent dans l’Erdre des sillons de l’être qui s’étiolent dans l’asprasse qui terrasse. Rêver de l’ausionnel pour ne pas perdre la vie dans le toxique fiel du Réel. Ausionnel pour vivre en double et ainsi éviter de mourir dans la mort qui délire. Dé-liaison qui se dé-lit, là où lire la vie devient impossible, on en a perdu la Bible. Tourne, ensorcelle, bruit du fiel, mugit le ciel, le double a perdu son essentiel, il reste collé à terre dans la boue-miel qui craquelle, boumieliser comme pris au piège dans une toile d’araignée, ici trace de l’asprasse.

Le Transvivant taille dans la maille porteuse, hilare honteuse, fard menteuse, l’heureuse boumielisation explose donc de l’être les sillons. Conduire sans bruire sur les sentiers de la vie quand mugit la mort pernicieuse à l’intérieur du corps en dé-corps. Dieu le Père-ni-cieux que l’on ne trouve ni en eux ni aux cieux. Mieux vaut le pair que l’on trouve dans les airs, double fascinant qui permet à l’ausionnel de redonner vie au soi qui se meurt aux abois. Un tabouret à trois pieds tient très bien, tel un tabouret à quatre pieds. Mais lorsqu’un pied se casse, celui à trois pieds s’écroule dans la terrifiante houle de la mer amère. L’ausionnel peut être le troisième pied du tabouret à trois pieds. Le Transvivant a fait une boumielisation de l’ausionnel et le tabouret s’est écroulé. L’être qui était dessus s’est vu déchu du pouvoir d’exister, choir.

Quand on n’a plus de perchoir pour se maintenir dare-dare au niveau des autres, de la réalité, quand on a été boumieliser et que l’ausionnel s’est d’un coup délité, on tombe infiniment dans une irréalité asprassante qui hante jusqu’à la plus petite cellule du corps en dé-corps.

Reconstituer un perchoir pour se maintenir à la hauteur des autres et de leur réalité, peut-il se faire sans l’ausionnel ? Retrouver un troisième pied pour le tabouret écroulé, peut-il se faire sans l’autre-fusionnel, ausionnel ?

samedi 5 novembre 2011

Eloignement crée des tourments

Eloignement crée des tourments. L’attitude ne ment pas. Eloignement qui se veut protecteur, mais qui destitue d’une place, erreur. La maladie éloigne des autres, hôte indésirable qu’on est, on naît de soi-même. Aime la vie nous dit-on, mais quand le lien se délite, comment continuer sans tomber dans un vide-à-vide. Eloignement crée des tourments. Eclatement, des bris d’idéaux tombent à l’eau, on n’est que débris dans une poisseuse lie. On est ce qui vient liquider les espoirs des autres sur nous. On est moins que rien, pas besoin d’en faire un dessin. Eloignement crée des tourments. Au tournant on se retrouve face au miroir brisé, frisé de milles et un éclats aux abois. Bois jusqu’à la lie le poison qui délie. Délires pour ne pas sombrer dans le Réel abrupte et nu, cru, dans les éloignements meurtriers, qui l’eût cru. Délirer  pour que se relie du sens, encenses les effluves, en-sens les dimensions énergétiques, tiques suceuse de vide-à-vide.

 Eloignement crée des tourments. Trouver la bonne distance pour qu’une anse puisse relier à l’autre, permettre. Pair-maître, amitié fusionnelle avec les pairs, pied-de-nez aux mètres qui séparent de l’être aimé, sacrifié. Sacre de la reine, trouver les rennes qui puissent guider dans l’envers du monde, dans l’irréalité. Ré-alité, au lit de l’asprasse qui terrasse dans un tour de passe-passe.

Eloignement crée des tourments. Le transvivant arrache une à une les parcelles de vie. Comment faire son nid dans un monde froid, icebergs qui broient, les sillons de l’être se jettent par la fenêtre. Feu-naître, la mort de la naissance. Absence, abnégation du soi, l’être n’existe que par l’autre. Autre qui se délite et se mélange, silence ; si la lance est jetée au loin, le besoin de soin se retrouve sur le corps en dé-corps, aussi loin du corps qu’elle est pu atterrir, elle le broie ici-bas. La distance n’existe pas. Eloignement crée des tourments. L’illusion de la séparation des corps ne tient que dans la terrienne dimension. On vient d’autres dimensions énergétiques, où la séparation n’existe pas.

Eloignement  crée des tourments. Peur du rejet ; peur de l’absolue solitude ; peur de ne pas être. La maladie éloigne avec poigne. Elle enferme dans un mutisme, une néantisation des émotions ; ça fait que l’autre s’éloigne, prison glacée. Eloignement crée des tourments. L’autre s’éloigne parce que l’âme se meurt. On est vide et mort, rien ne transparaît plus. Mais dans quel sens ça marche ? N’est-ce pas aussi les tabous de l’autre, du transvivant, qui barrent la pensée et confinent les émotions, dans une sorte de solution : mourir de vivre. Eloignement crée des tourments. Quelle est la cause, quelle est l’effet ? Est-ce plutôt une interaction circulaire entre ces différents éléments :

-          On est mort et vide alors les autres s’éloignent. Les autres s’éloignent de nous.

-          Les tabous du transvivant nous éloignent des autres. On s’éloignent des autres parce que la maladie enferment.

Qui s’éloigne de qui ? La distance n’est qu’illusion. Eloignement crée des tourments. Jalousie des liens des autres qui restent vivants. L’irréalité se propage aux liens familiaux et amicaux. Lutter pour que le monde reste vivant. Eloignement crée des tourments. La « petite » lutte contre la solitude absolue, cherchant la fusion comme remède. Aide, elle a tellement besoin d’aide. Eloignement crée des tourments. La fusion pour reconstituer l’autre et soi, la fusion avec un autre, l’autre devenant le troisième pied du tabouret, sans lui le tabouret s’écroule. L’autre fusionnel, l’ausionnel, comme barrage à la psychose. Quand l’ausionnel fait défaut, le tabouret s’écroule. Comment trouver d’autres ressources que l’ausionnel pour tenir debout ? Eloignement crée des tourments…

mercredi 2 novembre 2011

la voix de l'autre

La voix de l’autre intruse l’antre de soi. Hémorragie de l’intérieur à l’extérieur et inversement. Semant des pics de rythme et de tonalité, la voix assaille et se ment. La voix asprasse dans un tour de passe-passe. Elle s’insinue dans l’ainsi nu et cru dans l’écru qui craille les semailles. Ecroué à la voix qui se broie à la chaire sanglante, hante. L’ouïe, happée et fascinée (attirée, emprisonnée), ne trouve plus de sortie en l’entrée. Trait en pièces, traitre son qui balaie ce qu’on est avant même qu’on ne soit né. La voix humaine, venin du vœux du nain, demain persiffla et les tripes s’arrachèrent au pas. La voix humaine mène au trépas dans ce monde ici-bas. Flèche, poignard qui s’enfonce dans les organes qui se déchiquette. Telle intrusion que l’être en perd les sillons. Scions la cavité orale de cet autre qui nous torture par la voix qui capture. Flots de coques vides qui, telle une avalanche, broie ce qui nous fait tenir debout, vertébrale hanche. Avale-l’hanche  de la cavité orale, qui dans un râle s’empale. Sang pâle d’un être au bord de la fenêtre, feu-naître, antonymes qui s’écroulent et se mélangent.

L’écriture, les courbures lettrées forment un voile enveloppant et contenant qui protège de la voix, de sa crudité, des cellules auditives excitées sans protection, sans limite, se diffusant dans le corps éclatant. Courbure lettrées comme voile de réalité. Ré-alité aux mots qui disent les maux. On aime, oh combien, la tombe qui tombe, laissant place aux mots, miraculeuse farce. Face au soi qui se délite, laisser les mots envelopper le vide, le border, pour pouvoir exister.

lundi 17 octobre 2011

Séance d'équithérapie, quand les mouches amène l'irréalité

Les images sages se délitent au creux de l’ourlet de la vie. A-vide de tendresse, on cherche la vie en liesses, liée et déliée des images qui se font né. Pied-de-nez aux angoisses archaïques, aux tiques suceuses de vide-à-vide, la tendresse ne prend pas une ride. Umsaïda la porte en elle, fantastique dialogue tonique.

Mais ce jour-là, tout tourne à trépas. Trépasser, pas assez de trait pour que se dessine en rimes une anse de vie. Sens perdu, tout devient nu et cru, la vie se perd, qui l’eût cru ? Umsaïda s’agite, le bateau du corps en dé-corps gite, les mouches l’assaillent, elle frappe le sol, violence sur le corps en bémol, l’image reste la même, on reconnaît visuellement cette jument que l’on aime, mais elle ne semble plus indemne. Le Réel, toxique fiel, semble avoir emporté ce qui donnait à la vie un ciel ; il semble que la jument ait changé dans sa quintessence (même si son image reste la même). On n’arrive plus à entrer en contact avec elle, tout se fragmente en parcelles, la réalité se délite, puissante, terrorisante dynamite. Le voile du familier se voit asprassé par d’étranges nuées. Nu et cru, le sentiment d’existence se fait rance, on perd le fil de la réalité par les autres partagée. On est projeté dans une autre dimension énergétique. Cette dimension nous met en décalage par rapport aux autres, outrage. Outres où nagent des fragments de réalité dans une immensité ; mer sans fond qui happe indéfiniment. On n’arrive plus à maintenir un lien vivant avec la jument.

Jusqu’au coin où l’on s’arrête. Les mouches semblent se calmer, et Umsaïda retrouver de la sérénité. Tout redevient comme avant dans ce coin protégé du vent. On s’appuit le dos contre son flanc, douceur et chaleur redonnent vie, en-vie. L’irréalité se voit anesthésiée par la chaleur d’Umsaïda qui nous emmène loin du trépas. Bercements sur son dos, les yeux mi-clos.  Le cauchemar qui nous poursuit même au-delà de la nuit se voit amoindri. La jument retrouve sa quintessence loin du tourment, on retrouve le lien de vie, on la re-connaît, on co-naît ensemble tel un phénix renaissant de ses cendres. Méandres lointains, pantins aux yeux des mains, aux cieux demain.

Relater ce qui s’est passé dans cette étrange irréalité, avec ses mouches aux milles yeux assassins, aux milles souches, pose des mots sur les maux, et tout devient moins louche. Les courbures lettrées permettent de dire l’irréalité, et par là d’exprimer l’indicible, bible des sensations qui entravent de l’être les sillons. Ça permet aussi de partagé ce qui se vit dans les étranges nuées.

vendredi 23 septembre 2011

Raffales de sensations passées

Dans le creux du jour, là où l’ourlet tourne, se cachent des sensations passées. Pacsées au passé, elles tournent autour de l’être, prêtes à dévorer ce qui lui reste de sillons. Des rafales de sensations se pointent dans la jointure du présent, cède la serrure du passé. Harassée, on n’arrive pas à savoir ce qui nous appartient, ce qui est le soi, de ce qui est l’autre, ce qui est présent et nous constitue de ce qui est passé. Tout se mélange dans les langes dorées. Impossibilité de se voir habilité à exister. L’esprit ne trouve aucune unité, il est dispersé, broyé contre la mer aux dents de fer. Rejoindre la réalité par les autres partagée est-ce devoir se fracasser contre un mur ou se faire happer par les tréfonds sans fond ?

Le monde intérieur et extérieur se mélangent dans de tristes langes. Longer le monde humanisé, être sur le fil, dans une bulle, funambule. Longer le précipice au risque de se faire embarquée dans le vide-à-vide par une bourrasque tourmentée. Tourne, aimantée vers la mort, tout devient signe du trépas, pas à pas tout ce qui était familier se voit étranger, menaçant, traçant le meneur du monde dans un codage sans âge. Bris-des-âges, l’asprasse terrasse dans un tour de passe-passe. L’an passé, lent passé, lent pas assez sied, comment siéger en ce monde quand tout menace et rappelle au trépas… Très au pas, t’es pas en vie, envie d’exister simplement, amplement tout s’y refuse. Imaginer un futur où l’on devra exister en tant que soi, alors que les limites du monde vacillent sur leurs bases éphémères.

Croire en la spiritualité est-ce une spécialité de la psychose qui ose voir au-delà des normes sociétales un étale d’absolu ? Sectaire, sec ce qui tait la vie. Traire jusqu’à la lie la coupe qui passe, poisse d’angoisses. Les termes se fondent dans un hurluberlu fondu, ils font peur. Comment trouver le juste milieu entre une spiritualité qui se veut avancée et une vie en société ? Qu’est-ce qui relève du mensonge, où la limite de la secte ?

Quelles sont les idées avant-gardistes, quelles sont les illusions ? Il lut sillons de l’être, mais rien ne le laissa pressentir ni transparaître le sang qui coulerait, hémorragie  mortelle dans le ciel. Le conflit intrinsèque séquence le sens en morceaux rances. Danse avec le trépas, ne t’arrêtes pas, tourne et recule, avance et panse les maux par les mots, danse, mets toi en transe, et contemple l’absolu du vécu nu et cru, qui l’eût cru.

Les sensations passées reviennent hanter par le Transvivant dans les rangs du présent. Pressentir l’oppression qui presse le sentir dans un mourir sans bruire. Le conflit, les non-dits broient la famille. Hantée par la séparation qui disloque de l’être les sillons. Besoin d’un tiers pour mettre un pied à terre, face à la Mer du Transvivant déchaînée, l’embarcation  de la famille ne tien pas sans repères. Transgénérationnel coupe les ailes des ribambelles de vie, des envie, envie d’être en-vie.

Les sensations passées s’emparent, sans parage des bris-des-âges, sans part de vie dans le tipis. Elles oppressent dans le corps en dé-corps. C’est plus une sensation, une sensitivité pure qui prend littéralement aux tripes, qui broie l’estomac aux abois. Ça part du centre de l’abdomen et ça se diffuse insidieusement dans toutes les parties du corps. Ça commence par un fourmillement dans le corps, une oppression, puis, en écho, l’esprit sent le vide- à-vide, et est aspiré, happé dans un gouffre aux tréfonds sans fond. Vertige, éparpillement, morcellement, plus rien ne tient.

Il n’y a que les courbures lettrées qui puissent les exprimer. Sinon elles arrivent en hallucinations dans l’être ayant perdu ses sillons. Scions les sensations, la station debout devient intenable, insupportable même à son insu.

jeudi 22 septembre 2011

Ecrire le mouvement

Ecrire pour lancer au lent mouvement des mots traduisant les maux, tracer les courbures lettrées au gré du vent, le paysage intérieur se fait rieur au devant. Jaillissement qui ne ment pas, la psychose s’ose dans le terrain des mots où rien ne peut échapper aux choses reniées. Déniées et malencontreusement effacées, les choses perdent de leur quintessence. Les pistes se brouillent, ce qui apparaissait vrai dans la réalité partageable devient absent du Réel, toxique fiel. Les repères s’effacent et la seule trace qui tienne est sienne, celle qui fuselle sur le corps en dé-corps, menace.

Retrouver le mouvement, le frémissement des mots qui vient du dehors et s’offre à l’esprit dans un souffle maux-dits. Lâcher la hache de la mort, tord ainsi fait au festoiement des tourments où tournent les tours du mensonge dans les songes. Laisser jaillir les éclats de rire pour partir vers d’autres dimensions qui tracent de l’être les sillons. Ne pas avoir à construire de récit dans la nuit, laisser libre cours au court message, aux mages des âges sombres d’une messe qui se décline en liesses. L’homme descend du songe. Longe le bord de la béance, et lance des mots au-dessus du créneau pour que tout ne soit pas englouti sous l’eau. Le vide à-vide aux tréfonds sans fond, se laisse approcher par les courbures lettrées. Celles-ci ne sont pas les mots agencés dans une réalité ; elles sont anacoluthes qui percutent ; danse en transe, apparition du Réel, toxique fiel. Elles se décalent de la réalité partagée où la part âgée se fond dans un espace-temps aux contretemps musicaux. L’âge n’a alors plus aucune espèce d’influence, fluettement rance. L’espace et le temps sont gobés et néantisés par le Transvivant. L’asprasse terrasse dans un tour de passe-passe. Les courbures lettrées transcendent les cendres de la petite réalité partagée pour laisser place au Réel, toxique fiel.

Ainsi, les courbures lettrées redimensionnent l’univers, immense cratère.  Elles donnent un contenant aux angoisses, une bordure à la béance rance aux tréfonds sans fonds. Dès le matin s’atteler à la tâche pour éviter de se faire happer. Pérenniser le monde en y posant des courbures lettrées. Eviter ainsi qu’il s’envole, d’un coup de parabole. Ras-le-bol de ses angoisses, poisse. Besoin de souffler, ne pas de tout temps être happée, aspirée par le Réel, toxique fiel. Pourriture de ce qu’on est, on est moins que rien dans le bain de la vie. On est écorché vif, en survie, pétrie par les angoisses, poisse mélasse.

Ecrire, tracer sur le papier ces courbures lettrées permet de voler quelques instants de vie patents. Pas tant de faire figure de style que de se laisser guider par la Voix qui avoua la voie à suivre, ivre. Se laisser porter par les courbures lettrées, laisser la main guidée par elles sur le clavier. La Voix du dehors n’a jamais tort, lui faire confiance pour que se fiancent les courbures lettrées, enfantement d’une existence.

Le Réel, toxique fiel, cisaille le corps, à la limite de la mort, de la décrépitude, attitude. Titubent les pas sur le chemin du vieillir, la séparation absolue pointe, appointée, fait fie de la vie qui reste sur le zeste. S’accrocher désespérément aux illusions de la névrose face au vide-à-vide de la psychose. Psychiquement aller de mal en pis, puis ne plus résister aux impulsions de mort qui se font décors. Dé-corps, terreur de vivre, mourir d’un manque de savoir vivre, ivre d’angoisses, poisse mélasse. Terrifiante séparation qui détruit de l’être les sillons. Ne plus pouvoir être avec les siens, lugubre rature, la mort happe toujours plus jour après jour, la hache de la séparation absolue se rapproche toujours et encore. Impossible de se défaire de cette vérité. Terreur sans erreur, à chaque seconde, de perdre les liens, seuls sens à la vie.

Les courbures lettrées créent un espace où la vie peut éclore, protégée de la séparation absolue. Mouvement qui ne ment pas. Ecrire pour réussir à vivre.

samedi 17 septembre 2011

Il était une fois - Chapitre 7

Ils l’attrapèrent prestement. Le brouillard fantomatique se dissipa dans un bruit sourd. Les spectres s’égosillaient à conter l’histoire de leur mort. Ils avaient besoin d’aide. Leur tête et leur corps étaient remplis de mots sourds qui hurlaient de détresse. Ils étaient cloisonnés dans leur souffrance ne pouvant trouver de réconfort dans leurs paires aussi anéantis qu’eux. La séparation qu’il provoquait entre les vivants était aussi absolue entre eux. Ils se débattaient avec leur éclatement.

Petit Dom, Harry et Hermione avaient attraper la boule de vie, ils étaient maintenant protégés du brouillard fantomatique. Ils pouvaient se parler, se voir, s’entendre, se toucher. Ils étaient libérés de la séparation absolue. Bien sûr la solitude propre à la condition d’humanité était toujours présente, mais elle était atténuée grâce à l’amitié entre eux. Petit Dom pouvait, de part le caractère imaginaire de ses deux amis, fusionner avec eux, et se libérer du poids de la séparation. L’imaginaire était plus vrai que la réalité, il avait plus de saveur, plus de vérité ; leur amitié était ainsi inaltérable. La séparation absolue n’avait rien à voir avec la séparation ordinaire. La séparation absolue impliquait une scission complète, omniprésente et indéniable entre les uns et les autres. La seule chose que l’un pouvait voir de l’autre était une souffrance devant laquelle il était totalement et indiscutablement impuissant. En quelques sortes, Transvivant mettait des sangles autour de la tête de l’un pour le contraindre, sans aucune échappatoire possible ni aucun moyen d’action, à voir la souffrance de l’autre. C’est ainsi que la scène se rapprochait des tortures de guerre dans lesquelles, pour faire parler l’un, on torturait l’autre.

Ainsi la séparation absolue était une arme de Transvivant. Il se servait des morts pour la créer ; ceux-ci coupaient toute relation humaine entre les vivants. Ayant trouvé la boule de vie, les trois amis se voyaient protégés de la solitude absolue. De ce fait, ils purent s’unir pour entendre le cri de désespoir des spectres, les écouter. Ce faisant, ils les libéraient de leurs chaînes de mort. Ce n’est qu’en raison de leur lien d’amitié qu’il pouvait y arriver. La boule de vie agissait comme un diamant, catalysant leurs sentiments de vie pour la transmettre aux spectres.

Des nuées blanches montaient alors vers le ciel en milles et unes étincelles. Elles créaient un dôme de lumière qui les englobait, les protégeait. Magnifiques ramures d’étoiles, la toile de la vie se tissait autour d’eux. Tour de magie, ci-gît les oubliés de la vie. Sage « i » qui fait lien entre les mots. Enrageait Transvivant dans son antre malfamée. En effet, en plus de perdre les spectres, ils avaient une deuxième fois perdu une part de lui-même, une part de son âme.

Petit Dom, Hermione et Harry jubilaient.

Souvent on a dit de Petit Dom qu’il délirait avec ses histoires à dormir dehors, dans le vide, à choir. Delirare signifie « sortir du sillon », « sortir des rails », « dérailler ». Dé-railler pour sortir des railleries du monde. Sonde ce qu’il y a autour de toi, et vois, là, dans le brouhaha, la chaos de la source humaine, pêle-mêle des mots ; des mots qui ne suffisent pas à dire les maux ; des mots qui crée un voile d’illusoire où l’on saute de caillou en caillou, de signifiant en signifiant pour ne pas voir le vide aux tréfonds sans fond. Pour Petit Dom les mots ne remplissent plus leur fonction contenante, le voile de familier a été déchiqueté. Le Réel, toxique fiel, lui apparaît dans sa plus abrupte version. « Vers-sillon », vers d’autres sillons méconnus de beaucoup. Délirer, n’est-ce pas simplement sortir des réalités connues, conne et nues, de la société ? Rester sagement dans les normes pour que les angoisses s’endorment, c’est en oublier Hadès qui nous attend en liesse. Sortir des sillons, Petit Dom n’a pas vraiment le choix. Ça s’impose à lui. Le miroir des choses tombe et laisse apercevoir le néant, et l’ayant vu, il ne peut plus l’ignorer. Tout ce qui, avant, lui procurait du bonheur à la bonne heure, la Nature, la Vie, Transvivant l’avait volé pour ne plus que laisser apparaître l’essence abrupte des choses avec leur dose de finitude. Prélude à un effroi. Petit Dom devenait capable de voir les signes derrière l’image des choses. Ainsi, par exemple les glands qui tombaient sur le toit devenait en une fraction de seconde, le signe de la précarité des choses, le signe de la mort[1]. Et tout devenait signes, tel un message codé qui était adressé à Petit Dom, Harry et Hermione.

C’était ça, aussi, que la boule de la Vie venait contrer. Retrouver un espace de créativité où la nativité pourrait éclore dans une boule d’or. Permettre qu’une boucle vienne se dessiner, se tracer _laisser une trace_, sur cette Terre. Petit Dom, Harry et Hermione s’offrait ainsi le droit d’exister. Transvivant ne pouvait plus les garder dans l’effroi aux abois. Ek-sister dans l’ici et le maintenant, maintenant la vie dans un mouvement, comètes dans les mirettes. L’univers ne prenait sens qu’unis vers la vie. Petit Dom, Harry et Hermione unis vers le verre diffractant la lumière en milles et uns rayons. Luminosité diffractée en milles et uns signes. Seules les courbures lettrées pouvaient les réunifier.

Petit Dom, Harry et Hermione tombèrent sur un poème qui décrivait ce qu’ils venaient de traverser avant de trouver la boule de Vie. Ils s’assirent en rond, cercle contenant, pour le lire ensemble.




Le désespoir[2]


Méditations poétiques

Lorsque du Créateur la parole féconde,
Dans une heure fatale, eut enfanté le monde
Des germes du chaos,
De son oeuvre imparfaite il détourna sa face,
Et d’un pied dédaigneux le lançant dans l’espace,
Rentra dans son repos.

Va, dit-il, je te livre à ta propre misère ;
Trop indigne à mes yeux d’amour ou de colère,
Tu n’es rien devant moi.
Roule au gré du hasard dans les déserts du vide ;
Qu’à jamais loin de moi le destin soit ton guide,
Et le Malheur ton roi.

Il dit. Comme un vautour qui plonge sur sa proie,
Le Malheur, à ces mots, pousse, en signe de joie,
Un long gémissement ;
Et pressant l’univers dans sa serre cruelle,
Embrasse pour jamais de sa rage éternelle
L’éternel aliment.

Le mal dès lors régna dans son immense empire ;
Dès lors tout ce qui pense et tout ce qui respire
Commença de souffrir ;
Et la terre, et le ciel, et l’âme, et la matière,
Tout gémit : et la voix de la nature entière
Ne fut qu’un long soupir.

Levez donc vos regards vers les célestes plaines,
Cherchez Dieu dans son oeuvre, invoquez dans vos peines
Ce grand consolateur,
Malheureux ! sa bonté de son oeuvre est absente,
Vous cherchez votre appui ? l’univers vous présente
Votre persécuteur.

De quel nom te nommer, ô fatale puissance ?
Qu’on t’appelle destin, nature, providence,
Inconcevable loi !
Qu’on tremble sous ta main, ou bien qu’on la blasphème,
Soumis ou révolté, qu’on te craigne ou qu’on t’aime,
Toujours, c’est toujours toi !

Hélas ! ainsi que vous j’invoquai l’espérance ;
Mon esprit abusé but avec complaisance
Son philtre empoisonneur ;
C’est elle qui, poussant nos pas dans les abîmes,
De festons et de fleurs couronne les victimes
Qu’elle livre au Malheur.

Si du moins au hasard il décimait les hommes,
Ou si sa main tombait sur tous tant que nous sommes
Avec d’égales lois ?
Mais les siècles ont vu les âmes magnanimes,
La beauté, le génie, ou les vertus sublimes,
Victimes de son choix.

Tel, quand des dieux de sang voulaient en sacrifices
Des troupeaux innocents les sanglantes prémices,
Dans leurs temples cruels,
De cent taureaux choisis on formait l’hécatombe,
Et l’agneau sans souillure, ou la blanche colombe
Engraissaient leurs autels.

Créateur, Tout-Puissant, principe de tout être !
Toi pour qui le possible existe avant de naître :
Roi de l’immensité,
Tu pouvais cependant, au gré de ton envie,
Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie
Dans ton éternité ?


Sans t’épuiser jamais, sur toute la nature
Tu pouvais à longs flots répandre sans mesure
Un bonheur absolu.
L’espace, le pouvoir, le temps, rien ne te coûte.
Ah ! ma raison frémit ; tu le pouvais sans doute,
Tu ne l’as pas voulu.

Quel crime avons-nous fait pour mériter de naître ?
L’insensible néant t’a-t-il demandé l’être,
Ou l’a-t-il accepté ?
Sommes-nous, ô hasard, l’oeuvre de tes caprices ?
Ou plutôt, Dieu cruel, fallait-il nos supplices
Pour ta félicité ?

Montez donc vers le ciel, montez, encens qu’il aime,
Soupirs, gémissements, larmes, sanglots, blasphème,
Plaisirs, concerts divins !
Cris du sang, voix des morts, plaintes inextinguibles,
Montez, allez frapper les voûtes insensibles
Du palais des destins !

Terre, élève ta voix ; cieux, répondez ; abîmes,
Noirs séjours où la mort entasse ses victimes,
Ne formez qu’un soupir.
Qu’une plainte éternelle accuse la nature,
Et que la douleur donne à toute créature
Une voix pour gémir.

Du jour où la nature, au néant arrachée,
S’échappa de tes mains comme une oeuvre ébauchée,
Qu’as-tu vu cependant ?
Aux désordres du mal la matière asservie,
Toute chair gémissant, hélas ! et toute vie
Jalouse du néant.

Des éléments rivaux les luttes intestines ;
Le Temps, qui flétrit tout, assis sur les ruines
Qu’entassèrent ses mains,
Attendant sur le seuil tes oeuvres éphémères ;
Et la mort étouffant, dès le sein de leurs mères,
Les germes des humains !

La vertu succombant sous l’audace impunie,
L’imposture en honneur, la vérité bannie ;
L’errante liberté
Aux dieux vivants du monde offerte en sacrifice ;
Et la force, partout, fondant de l’injustice
Le règne illimité.

La valeur sans les dieux décidant des batailles !
Un Caton libre encor déchirant ses entrailles
Sur la foi de Platon !
Un Brutus qui, mourant pour la vertu qu’il aime,
Doute au dernier moment de cette vertu même,
Et dit : Tu n’es qu’un nom !...

La fortune toujours du parti des grands crimes !
Les forfaits couronnés devenus légitimes !
La gloire au prix du sang !
Les enfants héritant l’iniquité des pères !
Et le siècle qui meurt racontant ses misères
Au siècle renaissant !

Eh quoi ! tant de tourments, de forfaits, de supplices,
N’ont-ils pas fait fumer d’assez de sacrifices
Tes lugubres autels ?
Ce soleil, vieux témoin des malheurs de la terre,
Ne fera-t-il pas naître un seul jour qui n’éclaire
L’angoisse des mortels ?

Héritiers des douleurs, victimes de la vie,
Non, non, n’espérez pas que sa rage assouvie
Endorme le Malheur !
Jusqu’à ce que la Mort, ouvrant son aile immense,
Engloutisse à jamais dans l’éternel silence
L’éternelle douleur !






[1] Cf. le film Antichrist
[2] Poème de Lamartine

mercredi 31 août 2011

Il était une fois - Chapitre 6


Ils s’emparèrent de la boule de chaleur. A peine eurent-ils posé la main sur elle que tout se mit à tourbillonner, les images se télescopaient, les paysages changeaient de forme, celui du lac aux tréfonds sans fond se dissipait, laissant place à un panorama maritime paisible.  L’eau glaciale se transformait en océan turquoise bordé d’arbres côtiers ; il faisait bon y plonger. Le soleil enveloppait nos trois amis de ses rayons enjoués, orangés, rangées du haut de leur sphère, atmosphère détendue et conviviale, tellement loin d’être triviale après leurs mésaventures, la verdure les accueillait des ses milles attraits. Ils s’assirent au creux d’un arbre, et la luminosité de fin de journée flamboyait à travers la ramure de verdure, éclairant des endroits habituellement plongés dans la solitude. En effet, l’inclinaison de l’astre solaire faisait que des creux se trouvaient illuminés en début de soirée. La lumière projetait son bien-être sur ce et ceux qui l’entouraient. Cette luminosité en creux réchauffait les parties gelées de leur être. Comme les endroits naturels en excavation, des parties de leur êtres restaient sombre et mélancoliques. Ainsi, de sentir la luminosité les inonder apaisait leurs souffrances. Chacun a en lui une parte d’ombre et une part de luminosité ; ce qui compte est celle qu’on décide de transcrire dans ses actes, pacte solennel.

Et nos trois compagnons avaient choisi, nous le savons, la part de lumière. En retrouvant cette boule de chaleur, ils avaient détruit une part de l’âme de Transvivant. Ils avaient détruit le lac aux tréfonds sans fond. Seulement il en restait encore d’autres. Sans doute deux autres. Parce qu’il avait fallu à Transvivant trois générations pour anéantir toute intériorité, toute pensée émotive. Trois morceaux d’âme arrachés pour éviter de ressentir les choses. Trois meurtres de génération pour anéantir toute pulsoyance.

Petit Dom, Harry et Hermione se regardaient avec contentement. Ils avaient réussi cette effroyable mission. Ils décidèrent de prendre un peu de bon temps avant de s’engouffrer dans la deuxième béance rance. Il fallait qu’ils redonnent de la force à leur animal de pouvoir. Ils burent de la potion roborative, trinquèrent à la mal-santé de Transvivant, et s’entraînèrent dans un fou rire communicatif. Ils riaient tellement qu’on ne voyait plus le début ni la fin de l’éclat, les voix se mêlaient, les souffles hoquetaient en rythmes déployés, leurs corps ployés par l’ivresse de vivre se balançaient dans une lancée sans animosité, toute  morosité quittant leurs regards vifs et clairvoyants, riant du clair hirsute dans la hutte. Cette joie généralisée leur redonnaient un espace de vie.

En effet, Transvivant cherchait à tout prix à forclore la vie. Ils mettaient ses proies sur le fil, funambule dans sa bulle. Le fil entre la vie et la mort. Rien n’échappait à la règle, le drame était imminent tout le temps. Tout reflétait la mort, tout rappelait sans cesse que la vie tue. L’illusion du familier, ce voile qui vous entoure et protège un espace de vie qui fait que l’on s’épanouit, était déchiquetée. Le Réel absolu flagellait de ses tentacules la moindre once de vie. Par exemple, Petit Dom ne pouvait faire un pas sans que la pensée qu’il allait mourir, que ceux qu’ils aimaient alors être tués, qu’un drame imminent se préparait, ne lui taraude l’esprit, sans que cette pensée ne s’impose si fortement dans sa tête qu’il en devenait absurde de l’écarter et de ne pas la craindre. Ainsi, tout devenait une épreuve, le moindre mouvement menaçait de tout faire basculer. Transvivant rodait dans chaque souffle, dans chaque infime mouvement.

La mort n’était pas en soi le fait le plus terrible malgré sa toute-puissance. Ce qui était effroyable était la séparation. La « sait-pas-ration » saisit la ration de vie, on ne sait plus quelle est la ration qui mène à la vie. Rationner la vie, voilà ce que Transvivant menait comme combat. La vie le dégoûtait ; il avait tellement souffert qu’il haïssait cette vie émotionnelle. « Cépage-ration », sur la page le rat de la mort explose les sillons de l’être, la vigne se tarit, la séparation guette sa proie. Ne plus laisser le moindre doute sur l’absolue solitude qui, jusqu’à la moelle, s’insinue. La séparation c’est ce qui arrache des bouts de corps. La séparation est ce qui dissocie de l’être les sillons.

Petit Dom, Harry et Hermione étaient tout à leur réflexion quand le vent se leva. Le souffle de Transvivant. La nature même semblait changée. Les images du paysage étaient les mêmes, mais leur quintessence était transformée. La moindre châtaigne tombant du ciel saigne de leurs veines. Vaines tergiversations, la mort se rappelait de partout. La moindre feuille tombant au sol signifiait la mort. Signes par milliers d’une hécatombe mortuaire. Ce qu’ils trouvaient magnifiques quelques secondes auparavant devenait effrayant.

Le paysage ne changeait pas en apparence, mais son essence devenait lourde et oppressante. Soudain ils aperçurent des ombres qui rôdaient, qui hantaient les alentours. Tour à tour ils se regardèrent et ne purent voir leurs regards respectifs tant les ombres s’y reflétaient. Quand ils essayèrent de parler, la brume glaciale des ombres stoppa leurs paroles ; ou plutôt leurs paroles furent happées par la brume glaciale, comme engluées dans les milles et uns méandres de la nébulosité. Ils tentèrent de se toucher, pour ne pas perdre le contact avec les autres ; il sembla d’abord qu’ils réussirent ; cependant, ils s’aperçurent prestement que le contact resta froid et insensible. Et en effet, une fine couche de brume les enveloppait et empêchait tout contact chaleureux et humain entre eux. Ils étaient séparés par les ombres, engloutis dans des excavations brouillardeuses, isolés absolument…

Les ombres sombres se mouvaient dans un silence figé, un de ces silences qui vous liquéfie jusqu’aux os. Ose ! se disaient les trois amis. Mais rien ne voulait sortir de ce silence glacé, morbide, à-vide. C’était une béance rance qui s’ouvrait autour d’eux. Un trou de ver qui déformait l’espace et le temps, faisant apparaître des spectres des générations passées. Parce que les ombres étaient en réalité des fantômes au dômes incertains. Ceux-ci avaient eu une blessure durant leur vie, une blessure tellement importante, qu’ils n’avaient pas pu quitter la Terre. Et plus précisément Transvivant ravivait cette blessure et se délectait de ces souffrances. Il les empêchaient de partir. Ainsi, les spectres cherchaient à se brancher sur les vivants dans la transgénérationnel pour assouvir leur soif de vie, de réconfort. Ils transvivaient à travers les vivants, cherchant désespérément un soulagement à leur blessure béante, bé-hante.

Petit Dom, Harry et Hermione se faisaient littéralement happés par les spectres. Toute leur substance vitale se voyait sustenter les ombres. Chacun était éperdument seul. Ils n’arrivaient plus à contacter de souvenirs heureux. Il semblait que les fantômes s’en nourrissaient, ne laissant plus qu’un sentiment de mort, et pire, de séparation. Les trois amis s’enfonçaient de plus en plus dans le marasme, des spasmes leur étreignant le corps en dé-corps. Le sang se figeait dans cette brume glacée. Le cœur ne battait plus qu’à un rythme très lent. L’an de la souffrance était déclaré.

Petit Dom tenta de penser à des souvenirs heureux, mais rien n’y faisait. C’est alors qu’un oiseau de pouvoir, un phénix pour être précis, jaillit dans le ciel brumeux. De le voir donna un soubresaut d’espoir à nos trois compagnons. Les ombres reculèrent alors de quelques mètres, suffisamment pour que les trois amis se ressaisissent. Les ombres furent attirées vers le phénix. On voyait son pelage perdre de ses couleurs, ses plumes tomber, son chant devenir lugubre… Il se faisait happer par les spectres. Les trois amis eurent à peine le temps de se prendre la main pour fuir que les ombres finissait  de tuer le phénix. Au moment où ils transplanèrent, ils virent le phénix renaître de ses cendres et s’envoler bien loin du monde des ombres.

Les ombres les poursuivaient dans une course effrénée. Alors ils pensèrent à des souvenirs heureux, à leur amitié. Une lumière jaillit de leurs baguettes, et forma une boule de vie. Ils l’attrapèrent prestement….   

dimanche 28 août 2011

Rediffusion du documentaire "Un monde sans fous ?" le samedi 27 août 2011 à 12h25 sur France 5

Rediffusion du documentaire "Un monde sans fous ?" le samedi 27 août 2011 à 12h25 sur France 5

France 5 rediffuse le documentaire "Un monde sans fous ?" le samedi 27 août 2011 à 12h25.
Pour ceux qui ne veulent pas attendre le 27 août ou qui l'auront raté, le documentaire est visionnable gratuitement dans sa version longue sur la page du site de Mediapart sur le documentaire "un monde sans fous ?".
Page du documentaire sur le site de France 5.
Lien vers communiqué de presse en pdf par l'éditeur/diffuseur du film.
Premier article de mediapart sur ce documentaire.
Le documentaire est ou a été dans les cinémas Utopia et vous pouvez acheter sur une clé USB le film dans DRM pour 5 € infos pratiques et renseignements. C'est intéressant si vous voulez une sauvegarde ou n'avez pas l'ADSL.
Article publié sur schizophrenies.wordpress.com lors de la première diffusion du documentaire.

mercredi 10 août 2011

Il était une fois - Chapitre 5


Au petit matin, ils se levèrent encore abasourdis de leurs visions de la veille. Le feu animait ses braises au milieu de la tente, et laissait assez de chaleur afin de faire chauffer le lait pour le petit déjeuner. Ils se régalèrent de tranches de pain de mie qu’ils trempèrent dans la boisson roborative. Une mission les attendait ; ils devraient plonger dans le lac pour récupérer la boule de chaleur volée par Transvivant. Cette boule était fragile et délicate. Elle avait la grosseur d’une bille et pouvait se trouver n’importe où dans le lac aux tréfonds infinis. Autant dire chercher une aiguille dans une botte de foin. Pourtant ils étaient plein de courage et d’espoir. Il s’agissait de redonner de la chaleur au monde, pour retrouver une anse de sens à laquelle se raccrocher, une once de vie en catimini. Ils sortirent le grimoire et relurent la recette de la potion amphibie. Celle-ci leur donnerait pendant deux heures des branchies pour pouvoir s’aventurer dans les tréfonds sans fond du lac.

Pour la préparer, il fallait une patte de lièvre pour la rapidité, du lait de chèvre pour l’agilité, des écailles de poisson pour les branchies, une plume de phénix pour la longévité _cet animal renaissant de ses cendres_, et des poils de licorne pour la pureté d’esprit. Heureusement, Hermione avait tout préparé avant de quitter le placard à chaussures ; elle avait pris soin de tout ranger dans le sac à extension indétectable. Ils mirent environ une heure pour la préparer et la faire cuir dans le chaudron en fonte, forger à la flamme de dragon (il existait en effet d’autres dragons plus ordinaires qu’Asprasse, des dragons de feu et non de gel).

Après avoir défait le campement, voilà nos trois héros prêt à ingurgiter la potion pour plonger vers une destinée pour la moins hasardeuse. La première gorgée ne produisit aucun effet. Cependant, à peine avaient-ils humecté leurs lèvres de la seconde goulée qu’une violente quinte de toux s’empara d’eux. Leurs poumons se rétractaient, ils suffoquaient, aux prises à l’air ambiant. Harry eut la rapidité, l’esprit assez vif pour pousser ses compagnons dans l’eau lugubre malgré que bleutée de glace, avant de se jeter lui-même, sans nul autre pareil. Au contact de l’eau leurs branchies nouvellement installées se détendirent et leur apportèrent l’oxygène tant convoité.

C’est alors qu’une nuée de petits poissons, dont il ne fallait pas négliger la potentielle dangerosité en ne se fiant qu’à leur taille, fondit sur eux, crocs acérés. Le banc avait pris la forme d’une gueule énorme et béante, désirant par-dessus tout happer ce qui se présentait. Petit Dom, Harry et Hermione ne prirent pas une seconde pour lancer le sortilège du fileus, et un filet argenté sorti directement de leur baguette, bloquant dans ses mailles serrées, les milliers de poissons aux crocs acérés.

Il nagèrent alors de plus en plus vite pour fuir à tout prix la gueule béante qui hantait encore leurs esprits. C’est alors que des tourbillons les emportèrent vers les tréfonds sans fond. L’eau glissait, giclait, s’endiablait, des volutes d’eau sombre les oppressaient de plus en plus, leurs branchies inondées ne pouvaient plus filtrer l’eau qui se densifiait tel un mur, telle une pâte informe et âpre, des geysers de glace jaillissaient des tourbillons et leur tranchaient la chaire, celle-ci laissant s’échapper des chapelets de sang coagulé, l’eau se transformait en un ennemi opaque et fourbe.

Ce n’est qu’au bout de quelques longues minutes qu’ils réussirent à se dépêtrer de ce tourbillon salé, sal et sournois. Sourds, noyés de milles et une goulées, leur goût les avaient quitter, plus aucun désir ne les animait encore dans l’intérieur de leur for. Ils étaient anéantis, mais avaient eu un soubresaut d’énergie pour lancer le sortilège bulboa, se retrouvant ainsi dans une bulle, insensibles aux atrocités ambiantes.

Ils étaient tous trois dans la même bulle, respirant le même oxygène, ballotés de-ci de-là. Des sourds murmures leurs arrivaient, un battement de cœur pulsoyait à l’unisson, la luminosité était assez rougeoyante pour dénoter avec le bleuté glacial environnant la bulle. Les lambeaux de chaire gisant après l’épreuve du geyser se fondirent les unes dans les autres, dans une régénérescence optimale. Ils sentirent leurs corps rétrécir et n’en former plus qu’un. Dans la douceur  de leur tanière embullée, ils renaissaient à eux-mêmes, puisant les uns dans les autres la force de vouloir revenir à la vie. Parce qu’avec ces évènements atroces, ils avaient perdu l’espoir d’un sens à la vie, et pour renaître il leur fallait une bonne de courage. Des nuées argentées voletaient autour de la bulle. Leurs trois animaux de pouvoir étaient là et protégeaient, de leurs corps, la bulle de renaissance. Ils scintillaient de milles éclats et redonnaient foi. Peu à peu Petit Dom, Harry et Hermione revinrent à la vie. La bulle continuaient de scintiller.

Arriver à leur taille réelle, la bulle commença à se dissiper progressivement. Il s’armèrent alors de leurs baguettes, prêts à toute éventualité. Les animaux de pouvoir n’avaient pas encore disparu et continuaient à les protéger de leur lueur argentée. Quand tout eu disparu, ils s’apprêtaient à devoir renouveler une expérience douloureuse, mais rien ne vint. Ils étaient encore sous le choc, mais tout restait au plus calme. Ils nagèrent un moment relativement long sans rencontrer de problèmes dans les eaux troubles du lac. Une heure était déjà passée sur les deux heures qu’ils disposaient avec leurs branchies. Le temps commençaient à compter.

C’est alors qu’ils aperçurent au loin la boule de chaleur. Elle brillait tellement fort qu’on aurait dit un phare dans la nuit la plus sombre. Mais devant eux s’élevait une forteresse gigantesque ; des sirènes nageaient en arabesques, portant des fourches aiguisées au plus près. Elles étaient répugnantes avec leurs yeux globuleux, leurs cheveux de paille, leurs cisailles à la place des mains, leurs habits de satin déchirés, leurs oreilles pointues, leur peau craquelée… Elles ne semblaient pas encore les avoir repérés. Mais un courant d’eau gelée les amenèrent au plus près de la forteresse. Alors un cri strident se répercuta dans les flots. Ce cri sifflait et se répercutait dans les tympans, les faisant vibrer de milles et une secousses, tremblement de chaire, tectonique des plaques de la sphère interne, terne et insupportable bruit, même à leur insu. Petit Dom, Harry et Hermione se bouchèrent les oreilles tant qu’ils purent, mais rien n’y faisait, l’ondulation sonore venait les percuter de plein fouet.

Plus le son entrait en eux, plus leurs corps se mettaient à vibrer, le temps se liquéfiait et l’espace ondoyait. En quelques sortes, l’espace-temps devenait aussi fluctuant qu’un nuage dans  le ciel, cotonneux, un véritable piège quand on le prend pour un siège. Siéger sur un nuage n’est qu’un leurre auquel les humains aspirent, au moins autant qu’à leur tirelire. Bref, l’espace-temps s’étirait et se rétractait à sa guise, ne laissant plus aucun repères à nos trois compères. L’ondulation sonore se faufilait jusqu’à la moindre de leur cellule, les faisant imploser sous le choc, comme de vulgaire breloque. Le cri était tel celui d’un bébé qui hurle à la mort.

C’était sous ordre de Transvivant que les sirènes s’exécutaient. En faisant imploser chacune des cellules, elles rendait Petit Dom, Harry et Hermione aussi vides que lui. C’est alors qu’Asprasse attaquait, dans des nuées glacées. Il rugissait de joie, et ce rugissement s’ajoutait au cri strident des sirènes. Mais nos trois héros maintenaient le cap, envers et contre tout. Evidés de moitié, ils continuaient à nager vers la forteresse. A leur grande surprise, les sirènes ne pouvaient pas les toucher. Tant que leur esprit d’amitié restait, ils étaient protégés.

A peine eurent-ils posés un pied dans la forteresse que le cri strident se tut. Il était temps parce que leurs cellules avaient été presque toutes atteintes. Une porte s’élevait devant eux, grande, majestueuse, incrustée de milles et une pierres sombres. Cette porte résista à leurs vains essais pour l’ouvrir. Cependant des milliers de clés barbotaient de-ci de-là. Harry comprit bien vite ce qui les attendait : un ballet aquatique pour pouvoir récupérer celle qu’il leur fallait. Ils l’avaient déjà repérée ; c’était une grosse clé ancienne et rouillée, incrustée du signe de la mort. Ils se concertèrent un moment et décidèrent que ça serait Harry qui devrait se lancer à la recherche de la clé.

Harry scruta l’eau sombre, et ayant visualisé la clé, il se lança dans une nage frénétique vers elle. Mais à peine s’était-il mis en mouvement que les clés se mirent à s’agiter en tout sens, puis à se lancer à sa poursuite, leurs encoches devenues tranchantes et meurtrières. Harry nagea de gauche à droite, esquivant les plus gros calibres. La grosse clé ancienne était à quelques centimètres de lui. Il accéléra sa nage, d’un coup de pied dans les flots glacés. Il étira son bras, et dans un à coup sans douleur, il attrapa la clé tant convoitée. Cependant les autres clés continuaient à évoluer, assassines, atour de lui. Alors il lança la clé à Hermione et Petit Dom. Ceux-ci ouvrirent la mystérieuse porte, et dans un ultime coup de palme, Harry s’infiltra de l’autre côté. A peine eurent-ils fermé la porte derrière eux que l’assaut ténébreux des clés tranchantes vint se terminer cloué dans la porte. Ils l’avaient échappé belle !

Ils eurent à peine le temps de reprendre leur souffle qu’un courant glacial les enveloppa. Lorsqu’ils relevèrent la tête un poulpe immense s’imposa à leur regard. Il était gigantesque et visqueux. Il faisait des bruits de succions, engloutissant des tonnes d’eau à chaque inspiration. Tout tourna de plus en plus vite, l’eau se mit à jaillir, les muscles de nos trois compagnons se raidissaient à une vitesse astronomique pour résister au courant tourbillonnant des tréfonds sans fond. Mais rien n’y fit, l’aspiration était tellement grande, tellement brutale qu’ils furent engloutis avant d’avoir le temps de prononcer un seul sortilège. Ils se cognèrent les uns dans les autres, mais pas seulement, ils percutèrent aussi les parois flasques du poulpe géant. Plus ils se cognaient plus ils devenaient flasques eux-mêmes.

Quand la trombe d’eau finit de tourbillonner, quand le mollusque céphalopode referma sa grande béance buccale, quand les tentacules arrêtèrent de s’agiter en tout sens, l’intérieur du poulpe devint plus calme. Les trois amis reprirent peu à peu leurs esprits. Ils étaient plein de mucus collant, plein de morve de poulpe. Cependant, ils étaient relativement en forme. Une lueur leur chauffait le dos, atteignant leurs cœurs, apaisant toute tension, redonnant une vague d’espoir et de vie. Ils se retournèrent lentement, sentant la paix s’installer dans chaque cellule de leur être, en union avec la vie, dans une harmonie enjouée, dans un crescendo musical revigorant. Cela avait l’effet puissance mille de la boisson roborative. Ce qu’ils virent leur rendit le sourire : la boule de chaleur luisait dans les tréfonds du poulpe.

Ils s’approchèrent lentement, rampant sur les parois du poulpe. La graisse du mollusque suintait ce qui rendait l’avancée périlleuse. Ils s’agrippaient les uns aux autres pour réussir à progresser mètre par mètre. Plus ils se rapprochaient, plus les eaux glaciales se réchauffaient, plus ils se sentaient ivres de joie, plein de pulsoyance. Ils avancèrent la main, et dans un sursaut poignant, s’emparèrent de la boule de chaleur…

samedi 6 août 2011

Il était une fois - Chapitre 4

Dans leurs discussions, Petit Dom, Hermione et Harry avaient émis l’idée qu’il faudrait voyager pour détruire  Transvivant afin qu’Il cessa de leur nuire. Le placard à chaussure offrait une certaine sécurité, mais pas la moitié de chance de le supprimer d’une lance. Le placard à chaussure était un tant soi peu protégé grâce aux boucles de pensées chaleureuses dispensées par les dictaphones. Il s’agissait  de disposer des dictaphones tout autour de la pièce _plus la pièce est petite plus c’est facile, et nous pouvons dire, qu’avec le placard à chaussures c’était très facile !_, de vérifier les piles (à ne surtout pas oublier…), et de les mettre sur mode lecture. Des cassettes préalablement préparées ont été introduites dans les appareils. Il s’agit d’ultrasons émettant en permanence des pensées sources de chaleur. Ainsi, si Asprasse ou Transvivant approchaient, ils pouvaient être pris dans les boucles, laissant le temps aux trois amis de trouver une solution pour ne pas perdre de l’être les sillons.

Ainsi, les dictaphones devraient être du voyage. Voilage des bris-des-âge, ils seraient leur premier outil de diversion, celui qui dit et rappelle la version vers les sillons de l’être. Être hêtre de peu, voilà une bien difficile tâche. Petit Dom s’endormit près de ses amis dans le placard à chaussures. Ils avaient veillé tard pour mettre en place un plan contre Transvivant ; le premier endroit où ils seraient menés était un lac d’une profondeur infinie, plein de créatures plus terrifiantes les unes que les autres, refuge sans fond des serviteurs de Transvivant. En droit, ils seraient à l’envers du jour, se faisant troubadour dans les pourtours du temps alléchant ; allez les méchants, tenez-vous au devant, tourne le vent.

Hermione avait mis dans son sac (à extension indétectable) toutes sortes de choses dont ils pourraient avoir besoin : des cartes et parchemins, des piles de rechange pour les dictaphones, des plumes de chouettes et des queues de rat pour les potentielles potions à préparer, des boissons roboratives, de la poudre de quintessence vitale qui ramène des pensées chaleureuses quand tout se glace autour de soi, la cape d’invisibilité de Petit Dom, des livres, beaucoup de livres, le grimoire, et nous arrêterons la liste ici pour ne pas prendre la place de toute l’histoire.

Personne n’était au courant du coup qui rend le voyage moins terrorisant. A vrai dire, à dire vrai, personne ne savait qu’ils entreprenaient un voyage dans le bris-des-âges pour sauver le transgénérationnel, pour retrouver et recoller des parcelles de vie, pour réchauffer les âmes happées par le froid glacial et meurtrier de Transvivant. De toute façon personne n’aurait cru en leurs histoires, à Leur Histoire ; chacun en trouvait à dire, quel délire !, sans savoir que dé-lire c’est remonter l’histoire afin de lire à l’envers et y retrouver un sens pour s’accrocher malgré tout à un brin de vie, à un trans-lien humain. Lorsque Transvivant dé-lie, il s’agit de dé-lirer pour ne pas suffoquer, pour organiser les pensées en un sens qui tienne, sienne.

Petit Dom se réveilla au petit matin, clarté de la cécité assombrie brille de milles éclats orangés, l’astre solaire faisant la paire avec l’astre lunaire, cohabitation éphémère à nos yeux trop peu exercés à croire en l’invisible, sur la bible de la vie assainie. Il réveilla ses compagnons. Chacun but un peu de boisson roborative pour se réveiller sur le bon pied, et à cloche-pied s’en allèrent trouver une humeur plus sereine.

Petit Dom, Harry et Hermione ne donnèrent la main, et dans un éclair blanc transplanèrent au petit matin. En arrivant près du lac, l’air se fit glacial. Ils commencèrent par lancer tous les sortilèges de protection qu’il connaissaient autour d’eux, et ils firent en hâte la boucle de protection des dictaphones. Ils allumèrent ensuite un feu au milieu de la tente ininflammable et se lovèrent les uns contre les autres pour ne pas perdre la chaleur de leur corps. Le paysage était désertique. Des monceaux  de ferraille trainaient ici et là. Des os humains encore baignés de leur chaire sanglante jonchaient le sol. Un souffle glacé abrasait les monticules de cuticules arrachés un à un à leurs compatriotes humains. Au centre de ce paysage apocalyptique trônait le lac sans fond aux tréfonds.

Un brouillard se manifestait et s’enroulait autour de toute chose, comme pour les asphyxier. Hermione, dans la pénombre, se saisit de la torche incandescente et éclaira tout autour d’elle. Des fresques se dessinaient dans le brouillard. Nébuleux dessins, dans la vasque, ils ordonnaient de montrer son firman. Ô loin le firmament qui berçait les enfants, les voilà pris dans les grigris de l’enfer pour en faire un masque de fer. Les échos de leurs voix s’émiettaient. Le laissez-passer à montrer pour pouvoir décoder les fresques endiablées, était ce masque de fer. Mais comment Petit Dom, Hermione et Harry allaient-ils pouvoir le trouver ?

Ils comprirent rapidement qu’ils allaient devoir fabriquer le firman. Ils saisirent vivement dans le plus profond de leur chaire qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de fabriquer de leurs regards le masque de fer. Ils devaient se plonger dans le regard, miroir, de l’autre pour en extraire le point où toute différence est abolie dans un cercle infini, pâte informe. Ils se regardèrent, dans un regard qui se perd, qui se perd dans l’autre, l’Autre indifférenciable. Ils se sentirent se diluer dans un cri infini, les choses se mirent à tourner de plus en plus vite autour d’eux, insoutenable vision des corps qui s’écartèlent, sang s’épanchant dans de terrifiants tourments, Hadès guettant l’inceste des esprits pour que tout soit anéanti. Ce qu’ils virent leur imposa le martyre ; ils avaient fabriqué le masque de fer qui leur servait de laissez-passer pour pouvoir, les fresques, décodées. Des légions de dragons, tels Asprasse, gelaient chaque chose, chaque parcelle d’être humain, des guerres effroyables éclataient dans toutes les contrées du monde, des viols se perpétuaient, des bombes nucléaires explosaient anéantissant toute vie, des morceaux de corps volaient, des enfants étaient arrachés à leurs mères encore enceintes, des monstres marins faisaient jaillir leurs tentacules qui s’accrochaient aux jambes des navigants pour les entraîner dans les tréfonds sans fonds, des monstres terriens écrasaient la moindre cellule du corps dans le dé-corps… Des atrocités qui anéantissaient l’humanité.

Le plus grave de ces monstruosités résidait dans le fait qu’elles anéantissaient tout espoir, tout lien humain, toute accroche à la vie. C’était le monde que cherchait Transvivant. Un monde sans pensées, sans émotions, un monde vide, où il pourrait régner en maître. Il fallut des sommes considérables d’énergie à Petit Dom, Hermione et Harry pour se sortir de ce pétrin infini. Pour revenir au creux chaleureux de la tente, ils durent s’emparer du couteau, et dans un geste qui cisaille, sur le corps se faire des entailles. Profondes zébrures qui les ramenaient dans leur corps. Profondes zébrures qui faisaient couler le sang, versé pour affaiblir les justes.

C’est Hermione que revint au monde la première, au monde de la tente disons, parce qu’il lui était alors impossible de savoir quel monde était le vrai. Le monde de Transvivant, celui qu’ils avaient vu dans les fresques nébuleuses, lui paraissait, leur paraissait à tous trois, plus réel que n’importe quelle autre chose. Et non pas seulement parce qu’ils venaient de le voir, mais parce que Transvivant ôtait tout espoir en la vie, faisait régner le mortifère, et faisait percevoir le monde en tant que pure image éphémère et dérisoire. Ainsi, l’espoir perdu, il ne restait plus qu’à choir dans les limbes tristes et austères.

Petit Dom et Harry suivirent Hermione presque instantanément. Il se retrouvèrent tous trois dans la tente, et discutèrent jusqu’à une heure tardive pour renouer avec une ambiance chaleureuse. Peu à peu leurs corps se réchauffèrent, leurs plaies arrêtèrent de suinter, et il burent une boisson roborative pour se redonner de l’espoir. Leur amitié était le meilleur remède contre le monde de Transvivant. Leurs corps se rencontrèrent, et ils se prirent tous dans les bras les uns des autres, et dans une intensité amicale, ils retrouvèrent les sillons de l’être.

dimanche 31 juillet 2011

Il était une fois - Chapitre 3

Hermione était, comme à son habitude, plongée dans les livres de la bibliothèque, pour trouver des renseignements sur Asprasse et Transvivant. Mais ça lui prenait beaucoup d’énergie, car pour tout rend-saigne-ment, le sang coulait abondamment. Chaque bond des mots agitait en lui un mensonge qu’il fallait transpercer et, de son sang, laver. Hermione y mettait beaucoup de peine. Elle décodait, autant qu’elle le pouvait, les différentes théories sur les malaises (mal-aise) de la magie, pour comprendre plus à son aise pourquoi Transvivant sévissait dans les rangs. Des générations avaient été hantées, et en avaient perdu de l’être les sillons. Mais personne avant Petit Dom n’avait reconnu cet étrange hurluberlu fondu, n’avait accepté cette idée de se penser hanté.

Un grand mage noir sévit dans la communauté des générations depuis quelques années. Son influence augmente telle une religieuse mante ; ses adeptes se multiplient ; ils sont d’autant plus terrifiants qu’ils n’ont pas changer d’allure, et qu’on peut les confondre avec d’honnêtes gens. Pour celui qui n’est pas averti, il est très dangereux de se promener la nuit. Transvivant lance alors son dragon Asprasse sur ses descendants dans le transgénérationnel et happe de la vie toute étincelle. Les personnes deviennent vides de l’intérieur, sans souvenir du moindre martyre , sans souvenir du moindre membre de la famille, ils deviennent amnésiques de la vie, de tout lien qui fait qu’on se sent bien. Transvivant se terre dans la forêt depuis qu’il n’a plus qu’une demi-vie. En effet, il s’en est pris, sans autre sursis, au dernier membre né de la famille,  Petit Dom, comme il se nomme, et dans un éclair s’est vu explosé dans les airs. L’amitié entre Harry et Petit Dom avait permis à ce-dernier de se trouver épargné. Depuis sa naissance Petit Dom était ainsi lié d’amitié, et ça l’a protégé, on ne peut le nier. Depuis Transvivant n’a plus qu’une demi-vie, le sortilège de happage a ricoché et s’est vu sur lui retourné.

Voilà ce qu’Hermione avait pu lire dans l’ « Histoire de la magie noire ». C’était un livre de la réserve, et il fallait savoir le lire pour ne pas se retrouver happé dans ses pages hantée par les ancestraux sortilèges qui tournaient comme un manège. Il fallait le lire en récitant un poème pour que l’esprit reste bohème ; sans cette liberté de pensée, on se faisait à tout jamais happé dans les tréfonds sans fond. Il fallait les courbures lettrées du poétisé pour ne pas se faire avoir et à tout jamais choir. En effet, Hermione le savait, les mots étaient traitres et il fallait, sans aucun regret, les transformer en courbures lettrées, poétisées. Ainsi on pouvait exister dans une autre réalité. Une réalité où la parole de ce qu’on est naît d’un désir fragile ; île sur laquelle se meuvent des courbures lettrées. Ces dernières étaient de mutation des mots qui ouvrait sur une réalité parallèle, là où le soi prend des ailes.

Harry et Petit Dom prenaient un bon bol de chocolat dans le placard à chaussures ; les tasses fumaient, le sucre glougloutait, les cuillères tintinnabulaient ; de volutes de fumées en volutes d’amitié, ils passaient un bon moment à plaisanter. Mais plus ils plaisantaient, plus Transvivant se rapprochait. Rappelons que les pensée émotives, surtout quand elles n’ont pas muté en courbures lettrées, attirent irrésistiblement Transvivant dans un coup de vent. Il vient et happe, explose ces pensées pour vider la personne de sa substance humaine.

Soudain une gelée s’en prit aux volutes chocolatées, le blanc cassa les multitudes colorées, le goût sucré s’en est allé, étalé, liquifié dans une froidure qui vous clouait au sol, jusqu’aux os frigorifiés, jusqu’au zoo en plomb du placard à chaussure qui hurlait à la mort. Transvivant approchait de son sombre trait. Il happait toute pensée émotive, toute once d’humanité, tout espace de vie, et tout devenait glacial. Petit Dom s’écroula au sol : la tension de cette proximité était insoutenable. Carte sur table, voilà la vision qu’eût Petit Dom dans cet étrange dôme : de grand icebergs trônaient en cercle, avec dans le centre, de l’eau bleutée, glacée, dans un infini sans fond ; Petit Dom ne faisait que tomber dans ce liquide gelé, de plus en plus profond, de moins en moins d’air, l’eau comprimant les poumons, il se faisait happé de plus en plus dans cette béance rance, son esprit de plus en plus figé par l’eau gelée, impossible de recontacter un souvenir d’amitié. Petit Dom se disloquait dans cet abîme bleuté.

C’est alors que la voix d’Harry et d’Hermione lui revint dans un murmure sans rature. Il s’accrocha tant qu’il pu à ce fragment de vie. Quand il aperçu Transvivant dans les limbes d’antan il hurla de toutes les forces qui lui restaient, projetant sa baguette magique dans un geste leste, « AMIDEUS ! », et le spectre partit dans un râle gutturale.

Petit Dom resta allongé le temps de reprendre ses esprits, et ses amis l’entouraient de leurs bras, de leur regard apaisant, de leur présence pleine d’anses de sens. Hermione disait déjà à Petit Dom :

-          Il ne faut pas que tu laisses Transvivant pénétrer dans ton esprit. Il cherche à te réduire à néant comme tous ces pauvres gens de ta tribu transgénérationnelle… Luttes pour ne pas le laisser t’approcher. Accroches toi à nos symboles d’amitié. Harry et moi sommes dans ta tête, ensemble nous le réduirons en miettes !

-          Mais laisses-le souffler un peu ! s’enquit Harry. Tu ne vois pas qu’il vient de traverser un terrible danger !

-          Ne t’inquiètes pas, je vais bien, murmura Petit Dom, Hermione a raison, il faut que j’arrive à fermer mon esprit aux forces du mal. Mais je me sens tellement vide, tellement perméable et fragile quand Transvivant approche, qu’Il fait presque ce qu’il veut de moi. Heureusement, pour l’instant il n’a qu’une demi-vie, il ne peut pas m’anéantir. Et puis vous êtes là et notre amitié nous protège. Elle est garante de l’énergie de vie, mes chers amis.

Tous trois se rapprochèrent se mirent en cercle dans le petit abris à chaussures, et se servirent une nouvelle fois du bon chocolat. Il avait un goût sucré et vanillé. Les tasses tintinnabulaient joyeusement, l’heure tournait, ou plutôt elle filait, éprise des intenses discussions qui remettaient d’aplomb, de l’être, les sillons. Le sablier dans le coin, en bas à droite à l’entrée du placard, s’écoulait de plus en plus lentement, reflétant l’intensité si bien apprivoisée de leurs échanges plein d’amitié.